Faut-il nécessairement faire du « beau » pour séduire son marché ? Est-il est parfois plus opportun de faire du « carrément moche » ? C’est en rêvassant dans les magasins bio que nous nous sommes posé cette question. Saugrenue ? Pas tant que ça…
Le « moche » : un parti pris
Vous vous êtes sûrement déjà fait cette réflexion : l’identité visuelle de certains produits en magasin bio, ça pique un peu les yeux. Non ?
Nous mettons « moche » entre guillemets parce que d’aucuns vont protester : « Vous jugez ! C’est une question de point de vue ! » Mouais… Non en fait : quand c’est moche, c’est moche (ça va faire plaisir à certains).
Ceci dit, là n’est pas la question. Nous ne sommes pas là pour juger de la qualité de telle ou telle identité visuelle. Mais pour en comprendre la raison d’être.
La vraie question est donc celle-ci : est-il impératif de produire du « beau » en matière d’identité visuelle pour séduire son marché ? Et en ce qui concerne les produits bio, elle se pose vraiment.
Et puisqu’on y est — que de questions ! —, doit-on parler de « beau » ou d’ « esthétique » ? Les deux termes sont-ils vraiment synonymes ?
Un peu d’histoire : l’identité visuelle des produits bio dans les années 2000
Au début du XXIème siècle, les rayons bio sont carrément austères. Les emballages sont kraft ou blanc. Basta così. Les étiquettes sont imprimées au moyen d’imprimantes d’ « atelier » qui offrent bien peu de possibilités. Typos basiques, lisibilité pas toujours au top.
Du kraft, du blanc, des étiquettes « maison » : on optimise les dépenses. Et puis une identité visuelle, non seulement c’est considéré comme futile — voire inutile —, mais ça coûte de l’argent…
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Oui, c’est « moche », et alors ?
À cette époque, les consommateurs de produits bio sont des militants. Des early adopters qui n’ont que faire des emballages et des identités de marque. Ce qui les intéresse c’est le produit. Un point c’est tout.
Dès lors, pourquoi les marques investiraient-elles le moindre kopek dans leur identité visuelle ?
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Quid du bio en grande distribution ?
En ces temps lointains (et là, si vous voyez de quoi on parle, c’est que vous êtes vieux… NDLR : comme notre rédactrice), les produits bio sont « parqués » dans les magasins dédiés, fréquentés par une clientèle de marginaux. Vous savez, ceux qui allaient faire leurs courses à vélo. Bon, ok, c’est cliché…
Il n’y a quasiment pas de produits bio dans les grandes surfaces. Seules quelques marques pionnières y trouvent leur place. Bjorg par exemple, dont l’identité visuelle est conforme aux codes de la grande distribution.
L’identité visuelle des produits bio en 2022
Aujourd’hui, les produits bio ont une place de choix en grande distribution. Quant aux magasins bio, ils se multiplient un peu partout. Le marché a beaucoup évolué. Quid des identités visuelles ?
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Certains ont volontairement continué avec les codes originels : kraft, blanc, étiquettes « maison »
Pourquoi une marque telle que Primeal (plusieurs millions de chiffre d’affaires) ou Moulin des Moines continue avec ces codes ? Étrange : ils ont probablement les moyens de se payer une identité visuelle plus consistante…
Nous, on pense que c’est un vrai choix stratégique, conscient et réfléchi. Parce que ces codes sont indissociables de leur ADN, de leur identité. Depuis toujours, ça parle à leur persona, aux early adopters. Générations X et boomers.
Un tel positionnement visuel véhicule sans équivoque une forme d’indépendance versus le diktat du marketing. En gros : « Nous, on est restés les mêmes, on n’a pas vendu notre âme au diable ». Et ça génère de la confiance.
Astucieux…
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La grande distribution va jusqu’à s’approprier ces codes
C’est le cas des marques de distributeur Auchan Bio et Carrefour Bio. Ou encore de la marque Babybio (appartenant à un groupe générant plusieurs dizaines de millions d’euros de chiffre d’affaires).
Le budget, ils l’ont, c’est une évidence. Nous sommes prêts à parier que les agences de comm leur ont vendu que pour faire plus authentique, il serait judicieux que ce ne soit pas « trop beau ».
Et hop : on imprime de faux fonds texturés type kraft sur des poches plastique — non recyclables —ou du carton compact. On utilise des typographies « comme avant » : effet vieilli, manuscrites ou crayonnées. On tamponne par-ci par-là. On verdit un peu le tout…
Résultat : du vrai bio « authentique ».
Votre identité visuelle : « esthétique » plutôt que « belle »
La vocation de votre identité visuelle, c’est de répondre à un besoin lié à la perception de votre marque dans un contexte : votre marché cible.
Dès lors, nous parlons plus volontiers d’une recherche d’ « esthétique » plutôt que de « beauté ». Vous allez nous dire que c’est la même chose. Hé bien pas tout à fait si on s’intéresse au sens premier du mot « esthétique » dérivé du grec aisthêtikos : perceptible, sensible.
En ce sens, l’identité visuelle est esthétique lorsqu’elle provoque un ressenti en harmonie avec les attentes de votre marché. Et il n’est pas exclu que cela se matérialise par ce que nous considérons comme « moche ». Trop rapidement peut-être…