Les intelligences artificielles sont-elles intelligentes ? Sont-elles créatives ? Et si c’était la fin des agences de communication visuelle ?
Vous avez probablement entendu parler des créations graphiques générées par une intelligence artificielle. Depuis quelques mois, cela fait grand bruit. Le principe : il suffit de saisir des mots-clefs et l’IA génère un visuel illico. Et voilà. Fastoche.
De fait, la question de l’avenir même des agences de création graphique se pose, puisque l’IA génère instantanément – et gratuitement – les visuels les plus fous.
Sueur froide.
Oui, l’IA génère des visuels. Pour autant, peut-on parler de « création » graphique ?
Et au final, on se demande si Dall-e ou Midjourney constituent une menace sérieuse ou une prodigieuse opportunité pour les designers graphiques.
IA : Intelligente ET créative ?
Nous parlons dans cet article de « créations graphiques ». Mais qu’est-ce qu’une création ?
Et puis l’intelligence artificielle, au fait, c’est quoi exactement ? « Artificielle », on voit bien. Mais « intelligence » – trop souvent assimilée au seul quotient intellectuel –, c’est déjà plus complexe.
Intelligence d’hier et d’aujourd’hui
Le Petit Robert définit l’intelligence comme la « faculté de connaître, de comprendre ; qualité de l’esprit qui comprend et s’adapte facilement ».
Et les Grecs anciens, ils en disent quoi ?
Socrate inclut l’intelligence « dans le genre de la vertu et des biens de l’âme, à côté du courage et de la tempérance ». Quelle classe ce Socrate… Et d’après Platon, « il ne pourra jamais y avoir de sagesse et d’intelligence sans âme ».
Bon, avec tout ça, on ne voit pas bien comment une machine pourrait être intelligente. Mais ne soyons pas mauvais joueurs…
Dis, Papa, c’est quoi une IA ?
Le parlement européen définit l’IA comme tout outil [logiciel, application] utilisé par une machine pour « reproduire des comportements liés aux humains, tels que le raisonnement, la planification et la créativité ».
On aurait pu s’arrêter là mais on aime bien fouiner.
Alors on a interrogé Robert. Pas le petit de tout à l’heure, non : Robert Pasero, scientifique à la retraite spécialiste de l’intelligence artificielle auteur d’une thèse sur la « Représentation du français en logique de premier ordre en vue de dialoguer avec un ordinateur ». Autrement dit, la recherche d’une formalisation d’une grammaire électronique du français (lexique, syntaxe et sémantique) : « Ce qui a permis l’approche actuelle [basée sur l’accumulation de data versus une approche mathématique], c’est la puissance des machines et leur capacité à mémoriser. On appelle ça de l’intelligence artificielle mais cela n’a rien à voir avec de l’intelligence artificielle ».
Allons bon ! L’IA n’est pas de l’IA ?
Et lorsque nous abordons le sujet des IA de création de visuels, son point de vue rejoint notre interrogation : « J’ai des doutes… La machine ne fait que ce qu’on lui a demandé de faire. C’est spectaculaire, mais est-ce que c’est de la création ? Je comprendrais assez bien que cela soit une aide pour le créateur ».
En résumé, la machine obéit à un ordre. Ce qui n’est en soi ni intelligent, ni créatif.
Parfait, on allait justement s’intéresser à la notion de créativité dans le contexte de ce qu’Aurélien Barrau – clivant docteur en astrophysique et en philosophie – appelle l’« inintelligence artificielle »…
Quid de la créativité ?
Il nous faudrait des tonnes de gigaoctets pour répondre… En gros, la créativité c’est la capacité à produire, imaginer, concevoir quelque chose qui n’existe pas à partir de rien. De rien ? Pas tout à fait :
D’un élan,
D’une inspiration – parfois jaillissante et s’imposant d’elle-même –,
D’une intention qui entre en résonance, consciemment ou non, avec une idée ou une information que l’on a un jour vue, lue ou entendue…
Magique.
Dès lors, difficile d’accepter l’idée qu’une IA puisse être qualifiée de créative.
Et on fait quoi avec tout ça ? On ferme l’agence ou pas ?
On vous le dit : c’est la fin des designers graphiques…
OK, l’IA n’est peut-être stricto sensu ni « intelligente » ni « créative ». Il n’empêche qu’à partir de simples mots-clefs, n’importe qui est capable d’obtenir des visuels réalistes et artistiques produits – plutôt que créés – par une IA.
On s’est amusés à explorer : il faut avouer que c’est bluffant…
Bigre ! Doit-on déposer les armes et nous reconvertir ?
On vous le dit : c’est pas demain la fin des designers graphiques…
Une pièce de haute couture produite par des « petites mains » reste la création du styliste. On est d’accord ?
Un visuel produit par une IA – nourrie par de la data – ne peut exister sans une demande exprimée, une intention : la création est donc d’origine humaine.
Démonstration :
- Notre client (enthousiaste): « IA, produis-moi une identité visuelle pour mon site internet aussi chaleureuse, conviviale et qualitative que l’est mon restaurant japonais! »
- L’IA (en PLS) : « … »
- Notre client (convaincu) : « Bon, je retourne chez Cominup… »
Outre l’élan créatif, la production de visuels en accord avec votre identité nécessite de la sensibilité créative. La raison d’être de votre identité visuelle est de transmettre une émotion, de rendre palpable des éléments abstraits – une ambiance, vos valeurs – dans un « langage visuel » unique : le vôtre. Le tout dans le respect des contraintes inhérentes aux différents supports de communication : site internet, réseaux sociaux, affichage, catalogue…
Nous voilà rassurés sur l’avenir de la profession !
L’IA : un outil au service du renouveau de la création graphique ?
Si vous nous connaissez un tant soit peu, vous savez que les vérités arrêtées, c’est pas vraiment notre truc. Oui, certains estimeront qu’ils peuvent très bien se passer de nos services puisque l’IA fait ça « très bien » et gratuitement. Soit.
Dans les années 80, quand les logiciels de CAO – création assistée par ordinateur – arrivent sur le marché de la création graphique, nombreux sont ceux qui prédisent la mort des agences de création graphique. Aujourd’hui, non seulement nous sommes toujours là, mais ces logiciels sont nos outils de travail.
Et si ces fameuses IA constituaient, en réalité, non pas une menace mais de formidables partenaires au service de la création graphique ? Renouveau.
La création graphique est morte : vive la création graphique !
